Vous avez pris ce livre en main et vous l’avez retourné pour lire le texte écrit à l’arrière. Vous voulez en savoir plus et vous faire une idée de ce qu’il raconte. Voir si cela peut vous intéresser.
Qui sont donc ces corps sensibles dont parle le titre ?
Eh bien, c’est vous.
Vous, oui, vous-mêmes. Qui êtes là, debout, un livre dans les mains.
Ce livre parle de vous.
Il parle d’un homme qui retrouve son frère pour vider la maison de campagne de leurs parents. D’un couple en vacances à Rome, qui n’arrive pas à trouver le sommeil parce qu’il fait trop chaud, surtout la nuit. D’une jeune femme qui ne supporte plus la vie que lui font mener ses deux jeunes enfants. D’un adolescent qui se rend compte que sa grand-mère ne sera bientôt plus qu’un souvenir pour lui.
Il parle de vous, de moi, de nous. De nous tous, qui sommes des corps.
Des corps humains.
Des corps sensibles.
Vous le savez bien, n’est-ce pas ?
- ISBN 9782931080429 (format broché)
- ISBN 9782931080436 (format ePUB)
- 122 pages
- Livre broché - 18€
- ebook - 9.99€
Extrait
Les pas perdus de la cigogne
La paroi coulissante s’écarte devant Céleste et elle peut voir le hall de l’aéroport, avec les échoppes de sandwiches et les magasins de souvenirs, éclairés par des néons. Il n’est que sept heures et demie du matin, mais il y règne déjà une agitation étonnante. Derrière une barrière de métal, quelques personnes attendent les voyageurs qui viennent de débarquer. Au milieu d’eux, Céleste aperçoit un jeune homme d’une trentaine d’années qui brandit une pancarte sur laquelle est écrit « Pr Adomba ». Elle s’avance vers lui en resserrant sa prise sur la poignée de sa valise qui chuinte en roulant sur le sol d’époxy très lisse.
Le jeune homme baisse les yeux vers Céleste qui attend calmement, un sourire aux lèvres.
« Vous n’êtes pas monsieur Adomba, dit-il.
– Non, en effet », dit Céleste.
Elle le voit froncer les sourcils et se remettre à observer la porte d’arrivée.
« Je suis Céleste Adombo, dit-elle en insistant sur la dernière lettre.
– J’attends un professeur, dit le jeune homme.
– Je suis professeur. »
Cette fois, il a une grimace.
« Oh. Cela veut dire que… Vous êtes… »
Il s’interrompt. Peut-être même se met-il à rougir, mais cette impression est sans doute due à l’éclairage trop cru qui tombe du plafond bas du hall d’accueil.
« Je suis désolé, reprend le jeune homme.
– Il n’y a pas de quoi, dit Céleste. Ce sont des choses qui arrivent.
– Mais non, dit-il. Il ne faut pas que ça arrive. » Et il ajoute, très distinctement : « Veuillez m’excuser, Professeur Adombo. »
Après quoi, en secouant la tête, ne parvenant pas encore à accepter cette méprise, il tend la main pour saisir la valise de Céleste.
« Ce n’est pas la peine, dit-elle. Elle n’est pas très lourde. »
Mais le jeune homme a décidé de se racheter coute que coute, et réussit à s’emparer du bagage.
« Je suis garé au parking 5, dit-il en montrant une vague direction. Voulez-vous que je vous dépose à votre hôtel, Professeur ? Ou bien vous préférez qu’on aille directement au musée ? Mais je dois vous dire qu’à cette heure-ci, il n’y aura personne. »
Pendant un bref instant, Céleste a l’impression que les lumières se mettent à clignoter autour d’elle, comme des guirlandes de Noël. Elle ferme les paupières sans parvenir à se débarrasser du léger vertige qu’elle éprouve. Elle n’a rien mangé depuis hier soir. Elle n’a réussi à avaler qu’une tasse de café, qui lui est restée sur l’estomac pendant tout le vol depuis Kinshasa.
Lorsqu’elle rouvre les yeux, elle constate que le jeune homme est tourné vers elle et qu’il la regarde avec gravité.