À première vue, les protagonistes de ce recueil sont peu ambitieux. Ils essaient de garder leur job et leur conjoint, de réussir leur divorce, d’éduquer les enfants, de soutenir un proche, de se pencher sur un mourant… Ils espèrent être appréciés et vivre en harmonie avec leur entourage. Rien d’extraordinaire. À première vue. Car les relations humaines sont rarement simples.
Souvent honteux de leurs peurs et de leurs faiblesses, ces personnages nous touchent parce qu’ils nous ressemblent dans leur désir, si souvent contrarié, de « bien faire ».
- ISBN 978-2-930538-88-4 (format broché)
- ISBN 9782930538891 (format ePUB)
- 128 pages
- Livre broché - 16€
- ebook - 9.99€
Extrait
La journée mondiale de la gentillesse
– Madame ? Asseyez-vous, prenez ma place.
Ah ben merde alors ! Quarante ans hier et ce matin on me parle déjà comme à une vioque. Je sais que j’ai une tête de déterrée rapport à ma biture d’anniversaire mais punaise si je fais plus vieille que cette meuf il faut que je fasse quelque chose et j’ai intérêt à me magner le train.
C’est ce que j’ai pensé ce matin-là dans le métro en refusant de m’asseoir rapport à l’erreur que bobonne faisait sur mon âge ou sur le sien.
– Madame, ne restez pas debout, il y a une chaise libre, là-bas au fond.
Mais qu’est-ce qu’ils ont tous aujourd’hui ? C’est la journée mondiale de la gentillesse ou quoi ?
C’est ce que j’ai pensé en attendant que mon numéro sorte au bureau du chômage.
– Madame, vous savez que vous ne devez pas vous présenter si vous êtes malade. Vous demandez un certificat au médecin et vous nous l’envoyez par la poste.
J’ai fait : D’accord quand je serai malade je viendrai pas.
En sortant de là je suis allée boire un coca au Mac Do pour me remettre un peu d’aplomb. Puis je suis allée au pissodrome moins pour faire vidange que pour regarder ma tronche dans la glace rapport à tous ces machin bazar de politesse du matin. C’est vrai que j’avais une sale gueule. J’ai pensé : T’aurais dû écouter Rita quand elle t’a dit de ne pas finir le carton de sangria après le pack de Cara Pils. Mais bon y avait plus que ça. On avait bu tout le pisang à l’apéro. Quarante ans ça se fête quoi.
Pourtant la vérité vraie c’est que j’avais peut-être une sale gueule mais je ne faisais pas vieille ni prête à claquer. Par contre j’ai capté d’où ça venait ces histoires de politesse : tout le monde a cru que j’étais en chimio rapport au foulard que j’avais bien arrangé autour de ma tête avec une torsade et tout puisque mes cheveux étaient dégueu vu que la nuit j’avais sué comme un poney et qu’à ceux du chômage tu dois montrer que du boulot t’en veux en étant présentable et même chic si possible. Je me suis dit : T’aurais dû te laver les tifs… Avec le foulard et ton teint blanc Dash rapport que t’as vomi ils t’ont filé un cancer dans leur tête.
Dans la presse
«La journée mondiale de la gentillesse», de Jacqueline Daussain
le 8 janvier 2019 - Jérôme Cayla