La vie est un sac de nœuds. Elle noue et dénoue sans ménagement le destin des êtres humains. Les nouvelles de ce recueil sont à son image : drôles, cruelles, inattendues, bouleversantes. On y trouve pêle-mêle un amour de jeunesse, un mari congelé, une mère malgré elle, la voix d’un fantôme, un pénis perdu, une justicière dans le bus, une libraire accrochée à ses livres comme une naufragée dans la tempête.
Autant de femmes et d’hommes qui font de leur mieux pour démêler les fils de leur existence.
- ISBN 9782931080580 (format broché)
- ISBN 9782931080597 (format ePUB)
- 124 pages
- Livre broché - 18€
- ebook - 9.99€
Extrait
Hannah
Je suis entré dans ce café par hasard. Mais peut-on parler de hasard lorsqu’on pénètre dans un lieu qui vous ressemble à ce point ? Le Pochtron-Minet était un estaminet comme je les aime : des affiches à la fenêtre, un jeu d’échecs sur une table, des vieux qui jouent à la belote, des amoureux qui se tiennent la main et une carte sans fin de bières belges. Le genre d’endroit où, trente ans plus tôt, j’étais capable de passer une journée entière… Et la nuit, s’il le fallait. À droite, les buveurs. À gauche, des tables recouvertes de nappes en papier bon marché. Le menu était minimaliste : omelette, salade et spaghettis bolo. Le plat du jour : lapin aux pruneaux. Le bonheur ! Surtout après une réunion aussi interminable qu’inutile. Dans cette ville où je ne connaissais rien ni personne, j’étais comme un naufragé qui retrouve la terre ferme.
Le rush de midi était passé. Une table s’était libérée.
– Installez-vous là, m’a dit le patron, en la désignant du menton. Je viens débarrasser tout de suite.
Emballage de sucre éventré, miettes de pain, poussières de tabac, traces de gros rouge. Un seul coin de la nappe avait échappé au carnage. Il était recouvert d’un dessin. En quelques traits de crayon gras, son auteur avait donné vie à un portrait d’une beauté saisissante. C’était une femme. La soixantaine.
C’était un croquis réalisé sur le vif. On distinguait les premiers coups de crayon, jetés à la hâte sur le papier afin de ne pas attirer l’attention du modèle. L’artiste était ensuite repassé sur certains d’entre eux pour mettre en évidence l’énergie de ce visage solaire. Il n’avait pas oublié d’ajouter quelques ombres laissant entrevoir ses fêlures.

