« Son train était prévu à 7h46 vers Bruxelles-Nord d’où il monterait dans le 8h06 vers Liège et Eupen. À 9h22, il descendrait à Verviers-Central. Elle l’attendrait sur le quai, “au pied des escaliers”, avait-elle précisé. Il se sentait un peu fou, comme le soir de leur première rencontre parisienne, quand il s’était retrouvé seul, sans elle, avec pourtant la certitude qu’elle était la femme de sa vie. »
Des voyages, des instantanés de vie surpris dans les trains. L’existence s’y conjugue, au fil des rencontres, à toutes les personnes du singulier et du pluriel. Des nouvelles comme des huis clos où l’être humain se retrouve face à ses fragilités, à ses drames, mais aussi à sa faculté de résilience. Des nouvelles d’amour et de vie où chacun peut se reconnaitre.
- ISBN 978-2-931080-10-8 (format broché)
- ISBN 978-2-931080-11-5 (format ePUB)
- 150 pages
- Livre broché - 16.00€
- ebook - 9.99€
Extrait
Un grand homme
J’ai rencontré Octave Richet dans le TGV Paris-Toulouse. Octave Richet est romancier, auteur de trois livres à succès, une bête de ventes, un ovni dans le monde de l’édition et de la librairie. Il était l’invité d’honneur du Salon du livre où nous arriverions un peu avant 20h00. Nous étions quatre, trois auteurs et lui, le grand écrivain qui s’efforçait de nous apprendre ce qu’écrire veut dire. Il nous racontait – et le volume de sa voix offrait également son récit à la plupart des voyageurs – qu’il revenait d’une rencontre en médiathèque où il avait reçu un prix, « le septième prix littéraire décerné à Eulalie secrète, mon nouveau roman », et où il avait rencontré des lectrices qui se pâmaient dès qu’elles voyaient son nom sur une couverture. « Alors, me rencontrer en vrai, vous imaginez, il a fallu appeler les pompiers, ah, ah ! »
Je n’imaginais rien du tout. Je trouvais cet illustre paon pénible et lamentable. Speedé comme tout homme de son importance, il serrait dans une main son téléphone portable qu’il consultait, tel le saint Graal, toutes les trois minutes. Ne vivait-il pas du désir que les autres avaient de lui ? Remarqua-t-il le regard que je lui lançais ? « J’attends un appel important, précisa-t-il. De Londres. Une interview. Je ferai la une d’un magazine british, yeaaah ! » J’acquiesçai : moi qui venais d’obtenir dix lignes sur mon dernier ouvrage dans Le Républicain lorrain, je ne pouvais pas me vanter de la même manière !
Satisfait de mon silence, qu’il imagina appréciateur et admiratif, Octave Richet poursuivit le récit de sa folle équipée provinciale. Les bibliothécaires, en majorité féminines, l’avaient accueilli avec des airs de midinettes énamourées. Il leur avait adressé un clin d’œil goguenard, salut, salut, petites gens, un large geste de la main droite, genre Rafael Nadal qui mène son adversaire à se prendre une gamelle, et était sorti répondre à un appel urgent de son attachée de presse bruxelloise. « Décidément, me dis-je, sa consommation abusive d’ondes hertziennes doit nuire à sa santé ! Lorsqu’il aura un cerveau-brocoli, il ne pourra s’en prendre qu’à lui-même. »
Dans la presse
D’excellentes nouvelles de Frank Andriat
le 4 mars 2021 - Grégoire Delacourt