Ils avancent sur une route. Ils suivent une trajectoire. Ils n’en sont pas toujours conscients. Ils roulent. À vitesse de croisière. Vitesse contrôlée. Ils ne savent pas très bien quelle est cette route. Où elle les mène. Ils sont seuls. Parfois, une rencontre, un rapprochement, une complicité inattendue. La sensation que tout est à nouveau possible. Le plus souvent, un dérapage, une dérive, un tournant. La perte des certitudes. La perte de ce régulateur de vitesse qui semblait animer leur vie. C’est tout autre chose qui s’ouvre alors devant eux.
- ISBN 9782930538327 (format broché)
- ISBN 9782930538334 (format ePUB)
- 118 pages
- Livre broché - 15€
- ebook - 9.99€
Extrait
Les douze volées
Il est parti. Tu te sens morte dedans, morte au dehors, tu ne sais pas encore que tu es au bord d’une chose nouvelle, on pourrait dire une nouvelle vie, et ce sera une vie sans lui, et il faudra tout réapprendre, tu t’en doutes un peu, il faudra beaucoup, beaucoup d’énergie. Il est parti et c’est la première fois que tu dors sans lui, et le lit est vaste et frais, et tu peux lire, manger, pleurer, te retourner en tous sens, et au fond c’est neuf, c’est absolument neuf, et tu te réveilles pour la première fois sans lui, douche, petit déjeuner, programme d’une nouvelle journée. Par la fenêtre c’est le même décor, la même rue sous le même soleil, on pourrait croire qu’il est seulement allé acheter un pain, des croissants, et bien non, cette fois c’est différent, tu te répètes que c’est différent, tu le lis dans le regard du chat qui se colle à tes jambes, et tu le sens dans la qualité de l’air et la qualité du silence. Cette fois, c’est l’absence. Ça fait un bruit fou, ça crie dans la tête, l’eau bout pour le thé, tu restes assise, immobile, le regard fixé sur le mur blanc, vidé des photographies. C’est un peu comme une grippe, une forte fièvre qui te laisse hébétée, au bord de toi-même. Tu voudrais retourner te coucher, plonger sous la couette, oublier, dormir donc oublier, mais tu sais déjà qu’au réveil rien n’aura changé, partout où tu iras tu n’entendras que l’absence de sa voix. C’est la première fois, le premier jour, tu te dis que demain ça ira mieux, le lendemain tu te le répètes, c’est une première fois qui va durer longtemps, longtemps, avant que le mur blanc soit redevenu un simple mur blanc.