Des policiers s’interrogent. Des criminels sont dépassés par les réponses qui se présentent. Des gens sans histoires tentent de prendre leur destin en main. Malmenés ou choyés par la vie, tous ont le choix, un jour ou l’autre, de se révéler au moins à leurs propres yeux. La vérité est une lumière noire qui brûle le cœur et glace le sang.
L’humour s’invite souvent dans les récits de Jan Thirion. Comme dans la réalité. L’ironie du sort n’est pas une expression vaine…
- ISBN 9782960050684 (format broché)
- 107 pages
- Livre broché - 14€
Extrait
Ruger et Manhurin
— Arrêtons de tourner autour du pot. Tu en as envie. J’en ai envie.
Je n’ai pas répliqué. Son ardeur m’a plaqué au siège. Ses lèvres et sa langue m’ont mis le feu. Avant le coma délictueux, je me suis dit : ça, c’est de l’adultère pendant les heures de service, et c’est irrésistible.
A trois heures du mat, il y avait peu de chance qu’on nous surprenne, même si on se donnait du bon temps sur la voie publique. On était quasiment dans le noir. Personne ne rôdait. Pas un clodo, pas un fêtard, pas une pute, pas un loubard. On était seul au monde dans le lit à baldaquin Peugeot discrètement intégré au rang d’oignons des voitures mortes. On s’était tenu éveillé en s’échangeant des bribes de nos vies et en vidant lentement le thermos de café tiède, jusqu’à ce que l’adrénaline explose et que tombent les pantalons.
Ce n’est pas simple de baiser à la va-vite entre flics, car il faut aussi retirer son matos de fonction. Menottes, matraque souple, portable ou bipeur pour les moins gradés, et le flingue, toujours le flingue. On s’est donc envoyé en l’air, pendant que son Ruger et mon Manhurin se frottaient l’un à l’autre et tressautaient sur la tablette au-dessus de la boîte à gants, sans arriver, eux, à s’extraire de leurs étuis. Ruger, petit flingue de fille. Manhurin, gros flingue d’homme.
C’était la troisième fois qu’on planquait ensemble. Les deux fois précédentes, on avait su se tenir.
D’habitude, je fais équipe soit avec le Polonais, soit avec Franck. Les nuits sont longues avec ces deux-là. Le premier me les casse avec ses films et sa cinéphilie. Tout ce qu’il fait, tout ce qu’il voit, tout ce qu’on dit lui rappelle une scène de film.